Nutriwell: l'art et les bienfaits des thés chinois
en préparations traditionnelles
Il y a thé et thé et, dans l'art des thés de qualité, il
conviendra de dépasser un certain nombre de préjugés. Il existe en effet
plus de thés chinois que de vins dans le monde et trois méthodes "justes" de
préparation en fonction du type de thé: le zhong pour les thés fragiles (thé
blanc, thé jaune ou thé vert), le gong du cha pour les wulong (thé
bleu-vert) et la grosse théière en porcelaine pour les thés rouges (appelés
thés noirs en occident qui correspond à l'appellation du Pu Er chinois, le
thé bien-être par excellence). Entrez dans l'univers des thés avec Nutriwell!
LES REGLES DE BASE
L'art des thés de qualité
« Le premier bol onctueusement humecte lèvres et gosier ;
Le deuxième bannit toute ma solitude ;
Le troisième dissipe la lourdeur de mon esprit,
Affinant l’inspiration acquise par tous les livres que j’ai lus.
Le quatrième produit une légère transpiration,
Dispersant par mes pores les afflictions de toute une vie.
Le cinquième bol purifie tous les atomes de mon être.
Le sixième me fait de la race des Immortels. (…) »
« Remerciement au censeur Impérial Meng pour son présent de thé fraîchement
cueilli »,
l’un des plus célèbres poèmes chinois sur le thé, Lu Tung, Dynastie Tang
(618-907),
Traduit par John Blofeld dans son ouvrage "Thé et Tao"
Qui ne connaît pas le thé, la boisson la plus bue au monde après l’eau ?
Mais d’un autre côté, qui peut se targuer de vraiment connaître le thé, son
histoire, sa philosophie, ses ustensiles, ses traditions, ses vertus, ses
poètes et ses milliers de variétés (il existe par exemple davantage de crus
en Chine que de vins dans le monde) ? Car avant d’être une boisson, le thé
est une culture, dans les deux sens du terme !
La plupart des occidentaux consomment encore du thé noir indien (appelé
« thé rouge » en Chine) en sachet. C’est pratique, rapide et les arômes
naturels ou artificiels plus le rajout de sucre, de lait et/ou de citron
masquent facilement un thé de piètre qualité. Depuis quelques années, on
note toutefois un engouement pour les thés verts, réputés excellents pour la
santé et très représentatifs de la mode asiatique. Surfant sur cette vague,
de nombreuses enseignes se sont ouvertes, de nombreux parfums ont été crées,
un marketing savant a été mis en place de manière à faire croire au
consommateur qu’il dégustait bien plus que du thé: une culture, un bienfait,
une philosophie, un bien-être !
Nous ne récusons ni les bienfaits du thé (mais alors de tous les thés, voir
plus bas la partie le thé et la santé), ni le bien être qui y est
naturellement associé mais il convient d'essayer de s'éloigner du folklore
qui entoure trop souvent le produit pour en masquer la vraie qualité. Un bon
thé n’est pas nécessairement un thé cher mais un thé qui est correctement
préparé et qui est dégusté avec le bon état d’esprit.
Le coût du bon thé doit de toute façon être relativisé. D'abord vis à vis
des thés en sachet vendus en grande surface. Lorsque l'on sait que la
matière première est de la poussière de thé (c'est à dire des morceaux de
feuilles de moins de 1mm) et que cette poussière est mélangée à d'autre
poussière de thé par les industriels afin d'obtenir une infusion au goût
constant, on se rend bien compte que le prix payé correspond davantage à
l'emballage et au marketing qu'au thé lui même. D'ailleurs, est-ce encore
bien du thé ?
Ensuite par rapport aux autres boissons. Prenons un thé comme La Beauté
Académique vendu CHF 45 les 100 grammes (30 euros). Avec trois grammes (soit
CHF1.35 ou 0.9 euros), il est possible d'infuser au moins 1.5 litres d'eau
(3 infusions successives de 50cl). Le coût au litre est donc de CHF 0.9 ou
0.6 euros! A comparer avec le prix des boissons gazeuses industrielle ou,
comparaison plus flatteuse et plus juste, avec le vin! Le thé chinois est
sans aucun doute la boisson qui bénéficie du meilleur rapport
bien-être/qualité/prix au monde!
La classification des thés chinois
Tous les théiers du monde appartiennent à une unique espèce: le thea
(camellia) sinensis de l'ordre des guttifères, de la famille des
Ternstroemiacées. Ouf! Cette espèce comprend toutefois diverses variétés
dont seulement deux sont utilisées pour la culture: les plants dits de Chine
(qui furent volés par les anglais et introduits en Inde dans la région de
Darjeeling) et les plants d'Assam, une espèce spécifique à la province
d'Assam en Inde, découverte seulement au 19ème siècle. Nous nous
intéresserons ici à la première catégorie.
La qualité d'un thé dépend évidemment de nombreux facteurs: l'âge du théier,
le sol, l'altitude, le climat, les soins apportés, le mode de récolte, la
date de la récolte... Un même thé variera donc d'année en année. Il donnera
également diverses qualités de thés. Tout d'abord en fonction de la
cueillette: celle ci va de la cueillette dite impériale (seul le bourgeons
ou la toute première feuille et le bourgeon sont cueillis) à la cueillette
grossière (les troisièmes, quatrièmes ou cinquièmes feuilles) voire la
cueillette mécanique (généralement néfaste au thé), en passant par la
cueillette fine (le bourgeon plus les deux premières feuilles).
Vient ensuite l'étape la plus déterminante pour la classification du thé: le
traitement subi après la cueillette. En fonction de celui-ci, un même théier
sera susceptible de donner les familles suivantes:
► Le thé blanc: rare, ce thé n'a subi aucune opération après la cueillette.
Il est cueilli et séché tout de suite. C'est donc un thé non fermenté, très
subtil, qui donnera une infusion de couleur cristalline. Il est réputé pour
faire baisser la fièvre et diminuer le feu dû aux éruptions cutanées. C'est
un thé très rafraîchissant, idéal pour les chauds mois d'été.
Yin Zhen ou aiguilles d'argent, thé rare et fragile cueilli à la main au
printemps,
sur une période de temps très courte de quelques jours. La première récolte
remonte à la dynastie Qing, en 1796. La cueillette est évidemment impériale.
Les feuilles sont ensuite mises à sécher. Il n'a a pas de fermentation. >
► Le thé jaune: rare également, il a subi une fermentation spécifique
légère, à l'étouffée. Les feuilles et l'infusion sont de couleur jaune.
► Le thé vert: désormais très connu en occident, c'est le thé le plus bu en
Asie, en Chine mais également au Japon, où il est considéré comme un produit
frais, riche en vitamines C (mais où la technique de fabrication, beaucoup
plus industrielle, diffère). Les meilleures cueillettes se font au
printemps. En Chine, les feuilles sont ensuite séchées à sec puis portées à
une température de 100°C pendant un court instant afin de détruire certains
enzymes néfastes au goût et rendre impossible une fermentation ultérieure.
Les feuilles sont ensuite refroidies et séchées. Comme il n'y a pas de
classification rigoureuse, on peut les distinguer fonction de leur feuille:
gunpowder (feuilles roulées en boules de 3mm), natural leaf (feuilles
naturelles, entières) ou torsadé par exemple. Mais cette classification
n'est pas satisfaisante car chaque jardin possède ses spécificités propres.
Et il existe plusieurs centaines de thés verts! L'infusion est de couleur
jaune ou verte, avec d'innombrables nuances.
< Long Jing, Puit du dragon, le plus fameux thé vert de Chine
► Le thé bleu-vert: Appelés wu long ou oolong ("dragon noir") à Taiwan, ces
thés sont parmi les plus recherchés chez les amateurs. Ce sont en effet les
seuls, du fait de leur complexité, à exiger une préparation en gong fu cha
(voir plus loin). Seule cette préparation permettra de faire ressortir le
parfum et les goûts subtils de ces thés, et de constater leur évolution au
fil des infusions. Leur nom vient de la couleur des feuilles, généralement
entières. Ils sont semi-fermentés et la fermentation varie entre 12 et 65%.
Il y a trois récoltes par année en Chine et jusqu'à sept à Taiwan. Il en
existe plusieurs milliers de variétés!
► Le thé rouge: Appelé "thé noir" en occident en référence à la couleur de
la feuille et "thé rouge" en Chine en référence à la couleur d'infusion,
c'est un thé fermenté à 100% et, de fait, beaucoup travaillé. Ce type de thé
est surtout consommé en Occident et la production chinoise essentiellement
exportée. C'est dans cette catégorie que l'on retrouve le plus de thé de
mauvaise qualité, du fait du procédé de fabrication industriel utilisé pour
les sachets, la méthode Crushing-Tearing-Curling (CTC) c'est à dire
Broyer-Déchirer-Rouler. Heureusement, c'est encore la méthode
traditionnelle, respectueuse des thés, qui est utilisée pour les thés de
qualité. Elle se déroule en six étapes: le flétrissage (faire perdre de
l'eau aux feuilles pour pouvoir les rouler sans les briser), le roulage
(briser les cellules des feuilles pour libérer les huiles essentielles), le
criblage (trier les feuilles en fonction de leur taille), la fermentation,
la dessication (pour stopper la fermentation) et le tamisage (pour trier à
nouveau les feuilles et éliminer les déchets). Démarré avec cinq kilos de
feuilles, il ne restera qu'un kilo de thé noir à la fin du processus. Il
existe de nombreux grades pour ce thé, mais essentiellement pour la
production indienne. La Chine ne produit dans cette catégorie que des thés à
feuilles entières, sans précisions de grade. Une fois encore, c'est une
question de jardins, de noms et d'experts! C'est le bouquet global qui sera
apprécié ici, la rondeur en bouche.
Dian Hong Gong Fu, superbe thé que la reine Elizabeth avait mis en bocal
uniquement pour le mettre en valeur et l'admirer >
► Le thé noir: C'est une spécificité chinoise. Il s'agit d'un thé
post-fermenté: il a subi une fermentation étalée dans le temps. Le Pu Er est
le plus représentatif de cette catégorie. Pour ce type de thé, on parle
davantage d'impressions et de sensations que de goûts ou de parfums. En
effet, ce thé est réputé posséder de nombreuses vertus, parmi lesquelles
celui de brûler les graisses. Comme il s'agit d'un vieux thé, il est en
général onéreux et victime de la contrefaçon: certains thés sont vieillis
artificiellement en usine et vendus l'année de leur récolte comme de vieux
thés! Acheteurs, attention!
► Le thé fumé: Longtemps, pour les occidentaux, ce thé a représenté le
thé chinois par excellence. Erreur! Fabriqué par accident au 19ème siècle
(le propriétaire d'une usine de thé réquisitionnée par l'armée tenta de
stopper la fermentation de sa production en faisant brûler du bois de pin
sous les feuilles), ce thé ne trouva preneur qu'auprès des occidentaux, qui
devinrent de grands consommateurs de ce type de thé. Le thé fumé est donc le
"thé des étrangers". Le chinois de la République populaire de Chine boit
quant à lui surtout du thé vert de piètre qualité, qu'il fait encore trop
souvent macérer toute la journée dans un bocal en verre. Imbuvable! Eh oui,
c'est injuste: les occidentaux ont en général accès à de bien meilleurs thés
chinois que les chinois! Dans cette catégorie de thés, le lapsang souchong
est le plus connu... mais sa qualité varie énormément.
► Le thé aux fleurs: Ce n'est pas une famille de thés proprement dite
puisque tous les types de thés peuvent en théorie s'allier aux fleurs. Nous
ne parlerons pas ici des mélanges faits par l'importateur avec des essences
ou des huiles essentielles naturelles (comme pour la plupart des thés
indiens) mais des mélanges faits par les producteurs avec des fleurs
fraîchement cueillies. Traditionnellement en Chine, seules quelques fleurs
sont utilisées: le jasmin, bien sûr, mais aussi le chrysanthème, le lotus,
l'osmanthe ou encore la rose. Les fleurs sont rajoutées avant que le
séchages des feuilles ne soit complet, lorsque le thé est encore chaud.
C'est lors de cette phase que les feuilles s'imprègnent en effet le mieux
des parfums environnants. Pour un thé rouge à la rose, il faudra par exemple
25kg de fleurs pour 100kg de feuilles de thé. On retirera ensuite les
fleurs, à l'exception peut-être de quelques pétales pour la décoration. On
l'aura bien compris: certains mélanges sont plus appropriés que d'autres et
la qualité du thé reste primordiale. Il est par exemple navrant que la
plupart des thés verts au jasmin servis dans les restaurants soient de
piètre qualité et manquent cruellement de subtilité...
Les 3 modes traditionnels "justes" de préparation
► Le zhong en porcelaine pour les thés blancs, jaunes, vert ou aux fleurs:
Cette petite tasse en porcelaine (qui doit être de grande qualité et blanche
afin de pouvoir observer les feuilles) est très pratique et est utilisée
pour les thés délicats qui nécessitent une température peu élevée de
l’eau.
Le procédé de préparation est simple:
1. Mettez 2gr de thé au fond du zhong
2. Versez 1/4 d'eau froide afin de ne pas brûler les feuilles. Rajoutez
votre eau chaude et videz immédiatement votre zhong. Tous les thés chinois
doivent en effet être rincés au préalable. Les thés fragiles requièrent une
eau à 70°C et c'est la technique la plus simple pour atteindre cette
température, sans devoir attendre que la température redescende après
l'ébullition.
3. Sentez votre thé, dans le zhong et sur le couvercle, où les senteurs se
seront fixées.
4. Versez à nouveau de l'eau sur les feuilles (eau froide puis eau chaude)
et laissez infuser votre thé entre 2 et 4 minutes. Sentez à nouveau le
couvercle à plusieurs reprises (les parfums évoluent!) puis aidez-vous de
celui-ci pour filtrer les feuilles tandis que vous buvez en petites gorgées.
Vous pouvez également utiliser le couvercle pour remuer les feuilles dans le
zhong ou faire refroidir l'eau trop chaude.
5. Répétez ensuite l'opération afin de noter les évolutions . Au moins 3
fois, avec un temps d'infusion un peu plus court à chaque fois et jusqu'à
une demi-douzaine de fois, toujours avec le même thé. Tant que l'infusion
vous procure des sensations en tout cas...
► La petite théière dite de « Yixing » pour les thés semi-fermentés
bleus-verts, les dragons noirs « wulong »: le gong fu cha ou temps du thé!
Cette théière miniature (pour maintenir la température élevée de
l’infusion), avec ses formes multiples, fait le bonheur de nombreux
collectionneurs. Mais c’est la qualité de la terre, le grès plus
précisément, qui fit, bien auparavant, la réputation de la localité de
Yixing en Chine (province du Jiangsu, proche de Shanghai). Aujourd’hui,
cette fameuse terre à thé est épuisée et les vieilles théières, rares, se
négocient à plusieurs milliers de francs. Actuellement, la plupart des
théières Yixing sont donc plus intéressantes sur la forme que sur le fond
(faire ressortir la splendeur des thés, conserver une température élevée et
favoriser un culottage de qualité). La technique est sensiblement plus
compliquées que précédemment et requiert davantage d'accessoires. Nous
sommes loin toutefois de la cérémonie japonaise, où tout est codifié et où
une vie est à peine suffisante pour en comprendre toutes les subtilités. La
préparation "juste" chinoise est entièrement axée sur le produit, loin d'un
folklore pourtant à la mode. Que ce soit la main droite ou la main gauche
qui tienne par exemple la bouilloire, cela n'a aucune espèce d'importance!
Les instruments indispensables sont les suivants:
- une petite théière Yixing (Yixing Hu) de 10cl en bonne terre à thés.
- une tasse à sentir (Wen Xiang Bei)
- une tasse à déguster (Cha Bei)
- un bateau (Cha Chuan) pour faire chauffer la théière et les tasses
- un pot également en terre cuite (Cha Hai) pour accueillir l'infusion et
éviter que les feuilles ne massèrent trop dans la théière
- éventuellement des ustensiles pour verser le thé dans la théière (Cha Ze),
pour manipuler les tasses chaudes (petites pinces) et pour retirer les
feuilles de la théière et les admirer (Cha Chi).
Le gong fu cha se déroule comme suit:
1. Pré chauffage: versez de l'eau chaude dans la théière, disposée dans le
bateau. Videz la théière dans le pot.
2. Rinçage des feuilles: mettez 6gr de thé dans la théière, remplissez la
théière d'eau jusqu'à débordement pour chasser l'écume et videz
immédiatement dans le pot ou le bateau.
3. Videz le pot dans le bateau. Disposez-y les tasses pour les réchauffer et
replacez les sur leur support en bois. Vous êtes maintenant prêt pour
l'infusion proprement dite.
4. Versez l'eau qui vient de bouillir. La température souhaitée est 95°C
et cette température sera atteinte rapidement, avec les manipulations. Si
l'eau ne bout pas, la température sera trop basse. La question de
l'oxygénation ne se pose pas: l'eau se ré oxygènera de toute façon
lorsqu'elle sera versée dans la théière. Remplissez la théière jusqu'à
débordement afin de chasser l'écume. Recouvrez et versez encore de l'eau
chaude sur la théière fermée, toujours pour la chauffer.
5. Laisser le thé infuser une dizaine de secondes (quelque fois moins, selon
les thés). Un truc est d'observer le bec de la théière: lorsque la goutte
disparaît, l'infusion est à point! Le gong fu cha joue sur la concentration
des thés (votre théière doit être pleine de feuilles) et des temps
d'infusions extrêmement courts.
6. Videz la théière dans le pot, en la renversant dessus de manière à ce que
l'infusion s'écoule complètement. Les feuilles de thés ne doivent plus être
en contact avec l'eau de manière à éviter une amertume désagréable. D'où
l'intérêt des petites quantité d'infusion.
7. Videz le pot dans la tasse à sentir. Sentez. Videz la tasse à sentir dans
la tasse à déguster et sentez à nouveau la tasse à sentir maintenant vide.
C'est l'un des grands moments du gong fu cha, celui qui révèle la richesse
des thés wulongs. Notre système olfactif s'habituant à une odeur au bout de
3-4 secondes, laissez lui le temps de la transition...
8. Vous pouvez à présent déguster enfin votre thé, en l'aspirant en trois
petites gorgées. N'hésitez pas à faire un peu de bruit en aspirant également
de l'air.
9. Recommencez une nouvelle infusion et voyez comment les goûts et les
parfums évoluent! Les chinois considèrent généralement les infusions
suivantes comme étant les plus intéressantes. Certains jettent même la
première infusion. Assurez vous à chaque fois que la théière reste chaude,
ce qui supposera de vider de temps à autre l'eau du bateau.
10. Une fois arrivé à la dernière infusion (à vous de juger quand le thé est
épuisé; l'infusion est en général possible au moins une demi douzaine de
fois), retirez les feuilles de la théière. Vous pouvez les admirer mais
aussi les faire sécher et les utiliser comme désodorisant dans de petits
sachets en tissus ou comme purificateur en les faisant brûler. L'odeur est à
nouveau très agréable...
Un mot encore sur la théière Yixing et sur le culottage. C'est en effet ce
dernier qui ferra véritablement la valeur d'une théière. Une théière neuve
se doit d'être culottée avant d'être utilisée. Pour cela, mettez 10gr de thé
dans la théière, versez de l'eau chaude et laissez infuser 4 heures.
Renouvelez l'opération 4 fois. Puis recommencez avec encore 10gr de thé et 4
infusions successives. Voici pour la théorie. En pratique, vous pouvez
évidemment si vous le désirez déguster les premières infusions avant de
commencer le culottage. Cela prendra simplement un peu plus de temps. Dans
l'absolu, une théière ne devrait ensuite être utilisée que pour un seul thé.
Un moindre mal est toutefois de l'utiliser pour une même catégorie de thé,
les wulongs en l'occurrence. Il est exclu par contre de l'utiliser pour
d'autres catégories de thé, non seulement pour préserver les thés (les thés
fragiles cuiraient à l'étouffée) mais aussi pour préserver le culottage de
la théière.
► La grosse théière pour les thés rouges/noirs, chinois ou indiens: Ce sera
par exemple la théière classique en porcelaine, la théière de tous les
jours, simple et pure puisque la porcelaine ne dénature pas le thé. Dans le
doute, et à défaut d'une théière en terre cuite de qualité (qu'il conviendra
alors de culotter), c’est le meilleur choix! Une contenance de 40-50cl est
l'idéal pour 3-4 gr de thé. Si votre théière est plus grosse, veuillez ne
pas mettre trop d'eau, afin d'éviter que les feuilles n'infusent plus que
nécessaire. Rincez également le thé et re-infusez les feuilles au moins 3
fois (en attendant un peu plus à chaque fois)
Il convient par contre de fuir les théières en fonte ou en métal qui
dénaturent le thé. Cela a certes peu d'importance lorsqu'il s'agit d'un thé
en sachet ou aromatisé. Mais c'est une hérésie lorsque le thé est de
qualité... Il est intéressant de noter que ces théières sont à la mode en ce
moment et en vente dans presque toutes les boutiques de thés...
De même, il est essentiel de veiller à la qualité de l'eau. Rien ne sert de
préparer un grand thé si l'eau est souillée, pleine de chlore ou de
nitrates. Une eau de source au goût le plus neutre possible ou, mieux
encore, un système de filtre permettront de préserver les thés. Inutile je
pense de préciser que ces thés se dégustent nature, sans rajout d'aucune
sorte. La dégustation (notamment des wulongs) sera aussi meilleure espacée
avec les repas de quelques heures: avant pour ne pas perturber les sens,
après pour conserver les saveurs en bouche.
NB: toutes les indication ci-dessus sont évidemment des généralités. En
pratique, il conviendra de rester flexible. Chaque thé de chaque saison est
unique et les variables telles que la grammage, la température de l'eau ou
le temps d'infusion seront à modifier en conséquence. Si vous n'avez pas un
expert sous la main, fiez-vous simplement à vos sens. Dans une dégustation,
le plaisir reste l'ultime juge!
Le thé et la santé
Selon la légende, il y a plus de 4000 ans, l'empereur herboriste Shennong
s'empoisonnait lui-même afin de tester les différents effets des plantes et
utilisait le thé comme contre poison. De fait, le thé fût longtemps
considéré comme un médicament, son caractère désaltérant n'étant relevé que
de manière anecdotique en queue de liste. Parmi les bienfaits du thé:
l'élimination de l'alcool et autres substances nocives dont les graisses,
l'augmentation de la résistance du corps, la prévention des caries
dentaires, l'activation de la circulation du sang et l'oxygénation des
organes, la purification de la peau et la dissipation de la fatigue et de la
dépression. Bref, le thé est considéré depuis des siècles comme une boisson
qui procure un bien-être général!
Récemment, ces propriétés ont été validées par le corps scientifique et l'on
connaît mieux les différentes composantes et principes actifs du thé: de la
caféine (également appelée théine), des tanins (ou plus exactement des
polyphénols), des huiles essentielles, des vitamines (A, A1, B2, B12, C et
P), 27 oligo-éléments (dont le fluor, le fer, le magnésium, le calcium, le
zinc, etc) et quelques 300 substances aromatiques.
Les scientifiques ont également découvert que le thé est une source très
importante d’antioxydants, notamment de flavonoïdes, parmi les plus
puissants pour combattre les radicaux libres responsables du vieillissement
des cellules et de nombreuses affections chroniques telles que le cancers ou
les maladies cardio-vasculaires. Une étude norvégienne a ainsi démontré que
les buveurs de thé présentaient un risque de maladie cardio-vasculaire
réduit de 40% par rapport aux non-buveurs. 2 tasses de thé (le minimum pour
bénéficier des bienfaits) apporteraient en effet autant de flavonoïdes que 7
verres de jus d’orange ou 20 verres de jus de pomme! Dans la gamme des
fruits et légumes, seules les fraises font mieux! De plus, 80% de cette
substance bénéfique est libérée en moins de 4 minutes d'infusion, ce qui
fait du thé notre première source alimentaire de flavonoïdes avec 60% des
apports. Le thé comme source d'éternité?
Arrêtons nous un instant sur la fameuse caféine qui, depuis quelques années,
semble jeter le trouble sur le thé. «Comment le thé peut il être bon pour la
santé puisqu'il contient de la caféine? » nous demande-t-on parfois.
Rappelons tout d'abord que cet alcaloïde possède de nombreuses propriétés
bénéfiques pour la santé: c'est un excitant du système nerveux qui stimule
l’écorce cérébrale, favorise la circulation sanguine et tonifie le cœur. La
caféine diminue donc la sensation de fatigue, facilite le travail
intellectuel, renforce la vigilance, améliore la concentration et combat la
somnolence. Evidemment, tout est question de dosage: « Tout est poison, rien
n'est poison » disait Paracelse. De nos jours, entre les mauvais cafés à
base de robusta (les bons cafés à base d'arabica contiennent bien moins de
caféine) et les sodas au cola, notre consommation quotidienne de caféine est
sans contexte trop élevée.
Et le thé alors? Et bien l'action de la caféine dans le thé diffère de la
caféine du café du fait de la présence des polyphénols, appelés communément
mais à tord tanins (il n'y a pas d'acide tanique dans le thé). Tanins et
caféines se combinent pour former un complexe qui ralentit l'absorption de
la caféine dans l'organisme: il faut 6 à 8 heures pour que l'organisme
absorbe la caféine du thé contre 2 à 3 heures pour la caféine du café. La
caféine du thé agira ainsi de manière plus douce et progressive: si le café
excite, le thé stimule sans énerver! Il n'y aura pas non plus avec le thé de
phénomène de brusque inversion où le sentiment de fatigue resurgit dès que
l'action de la caféine est dissipée. De plus, le tanin est un stimulateur de
la digestion qui aide à l'élimination des graisses et des alcools.
Les teneurs en caféine et en tanin (ainsi qu'en huiles essentielles et
autres substances bénéfiques) varient en fonction des feuilles. Plus les
feuilles sont jeunes (et donc situées en extrémité de tige) et plus elles en
contiennent: 3,5% de caféine et jusqu'à 12% de tanins pour les premières et
secondes feuilles contre respectivement 1,5% et moins de 5% pour les
cinquièmes feuilles. Une exception: il y davantage de fluor dans les
vieilles feuilles mais l'infusion n'a alors que peu d'intérêt. Pour un
excellent ratio dégustation/santé, les thés de qualité sont à privilégier!
Les analyses diffèrent quant au temps d'infusion nécessaire pour libérer
toute la caféine des feuilles. 3 minutes? 6 minutes ? Cela dépend de toute
évidence du type de thé et de sa qualité. Ce que l'on sait de manière
irréfutable est que la caféine est libérée plus rapidement que les tanins.
Les personnes particulièrement sensibles à la caféine pourront donc trouver
profit à jeter le premier bain. Comme nous l'avons vu plus haut, les
feuilles de qualité peuvent de toute manière être infusées à maintes
reprises...
Existe-t-il des thés plus vertueux que d'autres? Evidemment! Les personnes
soucieuses de leur santé remplaceront tout d'abord, cela va de soi, les thés
industriels et les poussières de thés en sachet par des thés de qualité
constitués de jeunes feuilles. Elles préfèreront également un négociant
sérieux qui contrôlera les récoltes et le stockage des feuilles: il est
logique qu'un vieux thé vert aura moins de vertus qu'un thé fraîchement
récolté (à noter qu'au Japon, le thé vert est considéré comme une denrée
fraîche et conservé au réfrigérateur).
Ensuite, cela se complique un peu. Certes, certains thés ont des vertus
spécifiques historiquement établies, comme le thé noir Pu'Er vis à vis des
graisses et du rééquilibrage énergétique ou le thé blanc, réputé pour faire
baisser la fièvre et diminuer le feu dû aux éruptions cutanées.
Dernièrement, les scientifiques se sont surtout penchés sur le thé vert et
il semblerait en effet que cette catégorie possède toutes les vertus
décrites plus haut. Les thés non fermentés ou peu fermentés (thés blanc,
jaune ou vert) seraient ainsi à privilégier. Est-ce à dire pour autant que
les autres catégories sont moins bonnes pour la santé ? Certainement pas:
après avoir affirmé que le processus de fermentation du thé détruisait par
exemple la vitamine C, les scientifiques sont aujourd'hui en train de revoir
leurs copies... De même, les thés noirs contiendraient autant d'antioxydants
que les thés verts. La fermentation induirait également davantage de
tanins... Les thés wulongs (bleu-vert) seraient ainsi d'excellents
compromis...
Dans l'état actuel des connaissances, mieux vaut donc ne pas trop
généraliser: pour ne pas faire d'erreur, chaque thé devrait être analysé
individuellement à chaque récolte! Il y aurait du travail: rappelons qu'il
existe plus de thés en Chine que de vins dans le monde...
En conclusion, nous dirons donc que 1/ Le thé de qualité est d'une manière
globale excellent pour la santé 2/ Une consommation normale de thé n’est
associée à aucun risque particulier. 3/ Le thé doit rester avant tout un
plaisir. 4/ Il convient, c'est bien connu, de varier ses plaisirs... et donc
les types de thés!
Nous vous souhaitons de délicates infusions!
Nutriwell
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